Je ne le dirai jamais assez: pour moi, aimer voyager signifie en apprécier chaque partie, incluant de très longs trajets dans des trains délabrés vieux de 60 ans à travers des pays exotiques d’Afrique. Ce fut l’une de mes expériences de voyage les plus uniques à vie, malgré que j’avais été dans plus de 50 pays avant ce voyage en 2019 — et ça l’est encore même après en avoir visité plus de 70 maintenant.
Voici mon expérience de train de 1000 kilomètres pendant 35 heures dans le sud de l’Afrique — et quelques réflexions plus philosophiques pour commencer aussi.
Base du périple des voyages
Une des meilleures philosophies de voyages est que «le périple EST la destination» (the journey IS the destination) — je t’encourage donc à faire un effort et essayer d’apprendre à apprécier le périple. Surtout, je t’encourage à arrêter de penser dans l’état d’esprit d’aller à un endroit et que la seule partie significative du voyage est une fois que tu y arrives. Ça n’a aucun sens, car une fois que tu y seras, tu te déplaceras aussi (je l’espère du moins).
La notion de mouvement et le périple lui-même sont essentiels au mot voyage. Voyager, c’est bouger.
Dans le cas des trains africains, ce n’est peut-être pas confortable, mais sortir de sa zone de confort devrait être un des buts de voyager!
Ce trajet de 35 heures était génial pour ça. J’étais aussi en Afrique de l’Ouest quelques mois avant ce voyage et j’ai passé environ 10 heures avec des locaux dans des taxis partagés délabrés (des «combis» ou des «sept-places»), et c’était toute une aventure aussi — je raconterai dans un prochain article.
J’aime tout des voyages. Bien que je sois un AvGeek (geek de l’aviation) et que je choisisse de prendre l’avion dès que je le peux parce que j’aime aussi être en avion en tant que tel, plus j’essaie des trains longue distance, plus j’apprécie aussi cette façon différente de se déplacer.
Dans un article séparé, je parlerai davantage de pourquoi j’aime de plus en plus les sleeper trains, et pour ceux qui sont soucieux de l’environnement, de comment ils sont un excellent moyen de voyager plus écologiquement.
Base de mon voyage en train Zimbabwe-Botswana
Pour le moment, je vais te parler de mon voyage épique en train au Zimbabwe et au Botswana, en 3 tronçons:
- De Victoria Falls à Bulawayo
- De Bulawayo à Francistown
- De Francistown à Gaborone
Si tu as lu mon article à propos de ma baignade à Devil’s Pool au bord des chutes Victoria au sommet d’une chute de 100 mètres, tu sais que je visitais cette région comme première étape de mon voyage au sud de l’Afrique — pour profiter du deal génial des hôtels gratuits.
J’ai pris l’avion pour me rendre à Victoria Falls car je ne voulais pas forcément prendre le train dans les 2 sens. Faire l’expérience de tout en voyage une fois est quelque chose qui m’attire… mais tu n’es pas obligé de le faire 2 fois et de passer 70 heures dans des trains.
Tu peux toujours faire du mix-and-match et être créatif avec tes itinéraires, c’est pourquoi voyager de façon indépendante et bâtir ton propre itinéraire sera toujours mieux qu’un tour organisé. Et les vols allers-simples sont presque toujours la moitié du prix d’un aller-retour, du moins pour la plupart des vols courte-distance.
Donc, pour me rendre à ma prochaine destination, le Mozambique sur la côte Est du Sud de l’Afrique, j’ai regardé mes options et trouvé cet itinéraire amusant en train pour combiner avec le vol pas cher de Gaborone à Maputo (maintenant aussi peu que 250$).
Malheureusement, cette liaison ferroviaire complète est encore suspendue depuis la pandémie.
Voici comment c’était.
De Victoria Falls à Bulawayo
Je suis parti de Victoria Falls, Zimbabwe (la ville). En fait, je restais dans un hôtel Marriott gratuit du côté zambien de Victoria Falls (les chutes, pas la ville), mais c’est facile, pas cher et rapide de traverser — je l’ai fait 5 fois pendant mon séjour. C’est plaisant de marcher sur un pont vieux de 100 ans qui surplombe le fleuve Zambezi.
Tout d’abord, j’ai pris un train de nuit de 16 heures de là vers Bulawayo, la 2e plus grande ville du Zimbabwe.
Le train partait en soirée, à 19h.
La vue à partir du train était très jolie le matin, par contre je recommanderais de faire le voyage dans l’autre sens si tu le peux si tu fais juste une direction; il vaut beaucoup mieux voir la région avec des parcs nationaux autour des chutes Victoria que la zone près de Bulawayo.
Comme tous les sleeper trains (les trains-lits ou trains-couchettes), l’expérience elle-même est géniale. Tu peux voir la campagne et des endroits que tu ne pourrais probablement jamais voir autrement.
Tu as également la chance de parler avec les locaux qui prennent ces trains. Crois-moi, pour quelqu’un comme moi qui déteste les hordes de touristes, ce train était définitivement un espace sécuritaire — pas beaucoup de touristes ici!
Et voici un grand avantage pour les voyageurs à petit budget qui veulent voyager plus: les sleeper trains te font économiser une facture d’hôtel! Et pour ceux qui disent que le temps est plus important que l’argent, eh bien, tu voyages pendant la nuit pendant que tu dors, ça permet donc aussi d’optimiser ton temps de voyage.
(Quoique comme tu vas le voir, ce train-ci était loin d’être rapide!)
Ce trajet, y compris une couchette dans une cabine, m’a coûté un total de 3$US. Ou si tu veux te gâter et obtenir la cabine complète pour toi seulement, tu peux payer pour les 2 lits au prix ridicule de 6$. Je ne peux pas imaginer à quel point les sièges sont bon marché dans les wagons sans couchette.
Oui, tu as bien lu: 3$US. Pour un train-couchette de 16 heures. Même mon hostel à 5$ à Bali ne peut pas rivaliser avec cela — bien que mon hostel à 5$ à Bali était tout neuf et très propre.
C’était le prix en 2019, par contre, si tu as suivi l’actualité internationale, tu sais que les fluctuations peuvent être extrêmes au Zimbabwe, jadis émetteur des vrais billets de 100 mille milliards de dollars («100 trillion» en anglais). J’ai d’ailleurs récemment utilisé l’exemple zimbabwéen pour illustrer un concept très de base qui est vital et important sur la valeur des différentes devises de récompenses-voyage!
Ce long voyage en train était tout ce que je m’attendais à ce qu’il soit dans un pays qui a été ravagé par des crises économiques pendant une grande partie de son histoire.
Le train, construit par les Britanniques dans les années 1950, ne pourrait en aucun cas être considéré propre, mais cela fait certainement partie du charme. Il s’agit d’une authentique expérience zimbabwéenne.
Unique. J’ai adoré.
Les wagons portaient encore le logo RR de Rhodesia Railways (à ne pas confondre avec Rolls-Royce), nom qui date de quand le pays du Zimbabwe avait encore son nom colonial.
L’évier dans la cabine ne fonctionnait pas.
L’évier dans la salle de bains ne fonctionnait pas.
Le siège de la toilette était légèrement rouillé (ce n’est pas peinturé brun… c’est juste 100% de la rouille).
Et la «toilette» n’était en fait qu’un trou, donc tout finit sur les rails.
Une expérience mémorable à coup sûr!
Aucune literie n’était disponible, ce qui était une première pour moi dans mes 4 expériences de train-couchette.
Mais même si je suis complètement incapable de dormir sur des sièges normaux, s’il y a un lit, je suis correct. J’ai très bien dormi avec mon manteau de pluie comme oreiller. Malgré que le train basculait d’un côté à l’autre comme je n’avais jamais vu un train basculer, surtout à sa vitesse tellement lente (ou peut-être que c’est à cause de la vitesse tellement lente?).
Parce que je choisis de visiter des destinations abordables (pour voyager plus souvent), il y a un thème récurrent dans quelques-unes de mes expériences en train-couchette: pas de climatisation, ce qui signifie qu’il fait très, très chaud dans le train (les pays abordables ont souvent de vieux trains).
Il faisait insupportablement chaud au début, mais quand le train s’est mis à bouger et qu’un peu de courants d’air entraient et que les températures nocturnes ont chuté, c’était mieux.
Mais il était trop tard pour mon chocolat Astros, qui a fondu (je me suis souvenu de cette marque dans mon enfance — ils ont été discontinués depuis longtemps au Canada, mais ils en ont toujours dans le sud de l’Afrique).
Côté sécurité, les cabines se verrouillent de l’intérieur, donc pas de risque de se faire voler mon ordinateur portable ou autres objets de valeur. Tout le monde dans le train avec qui nous avons parlé semblait sympa, et les employés semblaient faire des tournées régulières.
Je dirais certainement que c’est un train sécuritaire.
Le train semblait assez plein de gens locaux, incluant des familles avec enfants, mais il ne semblait pas y avoir beaucoup de voyageurs. J’en ai vu aucun, en fait, à part mon nouvel ami irlandais Connor que j’ai rencontré à la gare et avec qui j’ai partagé une cabine pour économiser 3$ (#budgettravelforever).
Tu peux te promener dans le train, mais il n’y a pas de wagon de cantine ou quoi que ce soit du genre. Il y avait un wagon de rangement étrange, mais j’ai décidé de me mêler de mes affaires donc je n’ai pas ouvert la porte davantage.
Les lumières de notre cabine ne s’éteignaient pas — une chance que j’avais mon masque pour dormir.
En regardant dans une cabine voisine, on a réalisé où l’interrupteur était. Mais ça ne nous tentait pas trop de jouer avec les fils vu l’état du reste du train. Je suis un pro des voyages, pas de l’électricité.
Une chose est certaine: les voyageurs des 60 dernières années ont vraiment pris à cœur la requête du NRZ de faire attention au train pour le faire durer.
Mission accomplie: plusieurs générations ont utilisé chaque partie.
On comprend que la requête, elle n’est pas pour sauver de l’argent… c’est vraiment que si tu ne fais pas attention et que tu brises quelque chose, ça ne sera probablement juste jamais réparé.
Un dernier truc très unique est que le train s’arrête au milieu de nulle part pour prendre des passagers. Pas de gares, pas d’indications, juste des gens à côté des voies et le train s’arrête.
Le train est presque ridiculement lent — 400 kilomètres en 16 heures, c’est une moyenne de 25 km/h. Enfin, un rare train auquel notre VIA Rail canadien se compare avantageusement (je ne fais que blaguer… ou pas?).
On est parti à l’heure (19h) mais on est arrivé à Bulawayo à 11h au lieu de 9h, ce qui est apparemment toujours le cas. Le billet pour ce train peut être acheté seulement le jour même en personne à la gare. Ce n’est jamais plein.
De Bulawayo à Francistown
Après quelques heures à explorer Bulawayo, j’ai pris le train «normal» de jour à 14h pour connecter à un autre sleeper train à Francistown, l’une des plus grandes villes du Botswana. C’était ma première fois à faire 2 nuits de suite dans des trains.
Ce fut une expérience assez différente: un tout nouveau train exploité par Botswana Railways plutôt que par le National Railways of Zimbabwe.
Cela me donnait l’espoir que mon prochain sleeper train serait aussi agréable et que j’aurais de la literie cette fois, comme ça avait toujours été le cas ailleurs.
Il a fallu 5 heures et demie pour se rendre à Francistown (200 kilomètres, 36 km/h en moyenne).
Mais cela inclut le long arrêt à la frontière — c’est rarement rapide de franchir les frontières overland dans les pays moins développés. Les agents du Zimbabwe et du Botswana sont montés à bord, alors au moins il n’était pas nécessaire de sortir du train.
Ce trajet m’a coûté 70 BWP (~ 9$C), et j’ai pu réserver celui-ci en ligne à l’avance sur le site de Botswana Railways.
De Francistown à Gaborone
Le dernier tronçon du voyage a été de rejoindre la capitale du Botswana dans un autre sleeper train. L’horaire est coordonné avec le train Bulawayo–Francistown, il n’y a donc que très peu de temps d’attente à Francistown: l’escale est malheureusement très courte et je n’ai donc pas pu visiter la ville.
Si tu suis Flytrippers, tu sais à quel point j’adore les salons d’aéroport VIP et comment ils sont l’un des rares luxes avec lesquels je me gâte en tant que voyageur à petit budget — et tu devrais aussi, car c’est mieux que gratuit.
C’est pourquoi si je peux prendre l’avion pour le même prix que le train (comme c’est souvent le cas en Europe par exemple), je choisirai toujours l’avion pour relaxer et manger/boire gratuitement dans le salon.
Mais, à ma grande surprise, la gare de train de Francistown avait en fait un salon! Il était réservé aux passagers de première classe, ce qui signifie ceux comme moi qui ont payé pour un lit-couchette. Il n’y avait pas de nourriture et n’avait qu’une distributrice d’eau, mais c’était beaucoup plus calme et plus confortable que la salle d’attente générale.
Ensuite, il était temps d’embarquer et wow, quelle différence en une seule journée. Ce train était non seulement infiniment meilleur que le train de la nuit précédente (certes, la barre était très basse), c’était aussi le plus beau sleeper train de ma vie.
J’ai dormi mieux que je n’avais jamais dormi dans un train, ça c’est sûr.
Il semblait tout neuf et avait tout ce dont tu pourrais avoir besoin. Des prises de courant pour recharger ton téléphone, de la literie, la climatisation et même des lumières qui fonctionnent.
Il y avait même un évier fonctionnel!
Il y avait aussi un tiroir verrouillable (avec clé fournie) pour tes objets de valeur.
D’accord, si tu soulèves simplement le coussin du lit, le tiroir sécurisé n’est pas si sécurisé finalement, mais au moins il fonctionne pendant que tu es sur le lit.
Ou pendant que tu es assis, car les lits du bas peuvent être convertis en sièges confortables avant d’aller dormir.
L’employé très sympathique est même venu pour distribuer un sac avec des collations et une boîte de jus, qui est inclus pour les passagers de première classe. Les chips de marque Simba sont très populaires dans le sud de l’Afrique, et je dois dire que ceux à saveur de bœuf ne sont pas mauvais du tout. Ce n’est pas exotique comme les côtes levées de crocodile que je venais de manger en Zambie, mais pour un non-foodie comme moi, au moins les chips au bœuf étaient quelque chose qu’on a pas chez nous.
Il y avait aussi une voiture buffet/bar avec des collations et des tabourets pour se détendre et socialiser, et j’ai eu la chance de rencontrer et d’avoir des conversations intéressantes avec des locaux du Botswana et un groupe de bénévoles du Peace Corps américain là-bas.
J’avais rencontré les bénévoles dans le lounge plus tôt, et il s’avère que l’un d’eux était mon compagnon de cabine. Et heureusement, le train n’était pas plein, donc les 2 lits supérieurs sont restés vides.
Ce train beaucoup plus agréable a un prix plus élevé, évidemment, loin des 3$US de la nuit précédente. Cela m’a coûté 293 BWP (~ 36$C), ce qui n’est pas beaucoup plus que ce que j’aurais payé pour un lit dans ce pays pas si abordable que ça pour les voyageurs, étant donné le faible nombre de visiteurs. Et j’ai également été transporté à travers tout le pays, donc ce n’est pas trop mal.
On est parti à 21h et on est arrivé à 6h comme prévu (400 kilomètres en 9 heures, une moyenne de 44 km/h). La gare de Gaborone était toute neuve, tout comme celle de Francistown. Elle est située très près du centre-ville, j’ai donc pu me promener et explorer Gaborone à l’arrivée.
Le périple épique en train s’est donc définitivement terminé sur une note positive!
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Sommaire
Tu pourrais penser que ça semble ennuyeux ou épuisant de passer 35 heures en transit, mais au contraire. Bien sûr, cela prend beaucoup de temps et tu dois sortir de ta zone de confort, mais cela fait partie du voyage. Et ces trains au Zimbabwe et au Botswana en valent la peine, car tu économises de l’argent sur l’hébergement en dormant (confortablement!) dans le train.
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Photo de couverture: Quelque part au Zimbabwe (crédit photo: Andrew D’Amours/Flytrippers)